Accueil A la une LE PAIN SE FAIT TOUJOURS RARE : Une crise qui perdure et un système à revoir

LE PAIN SE FAIT TOUJOURS RARE : Une crise qui perdure et un système à revoir

Limogeages, arrestations, campagnes de contrôle, décret-loi contre la spéculation… L’Etat est parti dans une guerre sans précédent contre les spéculateurs pour mettre fi n à la crise du pain qui perdure.

L’arrestation, hier, du président de la Chambre nationale des propriétaires de boulangeries, Mohamed Bouanane, confi rmée par des sources judiciaires, ne constitue qu’un pas de plus dans ce que les autorités appellent une guerre contre le monopole. Dans cette crise du pain qui frappe le pays depuis plusieurs semaines, l’Etat est parti dans une chasse aux spéculateurs, mobilisant son artillerie lourde
Après le limogeage du président-directeur général de l’O ce des céréales, l’arrestation de plusieurs propriétaires de boulangeries, la saisie de milliers de tonnes de produits subventionnés, l’arrestation du premier représentant syndical des boulangeries intervient dans un contexte où la crise du pain perdure et la pénurie persiste, pendant que les autorités assurent qu’il s’agit d’une crise provoquée dans le seul objectif de perturber le climat social.
C’est le parquet du Tribunal de première instance de Tunis qui a autorisé les agents de la brigade centrale des délits financiers de la Garde nationale à El-Aouina, de placer en détention le président de la Chambre nationale des propriétaires de boulangeries, Mohamed Bouanane. Il a également été décidé de garder un boulanger et le propriétaire d’une minoterie qui l’accompagnait, et ce, pour suspicions de monopole et de spéculation des denrées alimentaires subventionnées. Une autre accusation de blanchiment d’argent pèse sur Bouanane.

Une crise qui n’en finit plus

S’agit-il d’un réseau de monopole qui serait à l’origine de la pénurie de pain ? Il est encore prématuré de se prononcer tant que la justice n’a pas dit son dernier mot au sujet des personnes interpelées. Mohamed Bouanane est à la tête de ladite Chambre depuis plusieurs années. Relevant de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), cette organisation syndicale représente des milliers de boulangeries réparties sur l’ensemble du territoire, dont notamment celles qui confectionnent uniquement le pain subventionné.
L’arrestation de Bouanane a fait l’e et d’une déflagration et sonne comme un avertisseur de plus dans la guerre annoncée par le Chef de l’Etat contre les spéculateurs qui provoquent, par leurs agissements, les pénuries et notamment celle de pain.
Il faut rappeler, dans ce contexte que la présidence de la République a déjà ordonné une campagne massive ciblant notamment les boulangeries. Près de 6.528 tonnes de produits subventionnés et 8,45 tonnes de sel alimentaire ont été saisis, seulement dans la journée du 15 août, dans le cadre d’une campagne de contrôle effectuée dans 15 minoteries.
A quoi faut-il s’attendre après ces derniers rebondissements d’envergure ? L’Etat possède-t-il d’autres cartes à jouer d’autant que la pénurie de pain est toujours de mise, notamment dans la capitale où les files d’attente sont toujours visibles devant les boulangeries ?

Revoir tout le système

Outre les arrestations, les limogeages et les campagnes de contrôle, c’est l’ensemble du système de subvention du pain qu’il faudra revoir.
En Tunisie, le secteur de la boulangerie comprend près de 5.000 établissements. On distingue environ 3.500 boulangeries qui reçoivent de la farine subventionnée, fabriquent et commercialisent du gros pain, ainsi que des baguettes subventionnés, alors qu’environ 1.500 boulangeries non classées ou dites modernes vendent la baguette à 250 millimes, quoiqu’elles achètent une farine de bonne qualité non subventionnée ainsi que des quantités de farine subventionnée.
Le système pose un gros problème au niveau du contrôle. De même, le secteur est confronté à un dilemme entre les anciennes boulangeries subventionnées par l’Etat, qui relèvent de la Chambre syndicale des boulangeries de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), et les boulangeries dites modernes non subventionnées, a liées à la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (Conect).
Il est donc du devoir de l’Etat de revoir tout le système de subvention du pain qui a atteint visiblement ses limites. L’ancien ministre du Commerce, Mohsen Hassan, joint par La Presse, est de cet avis. Selon lui, l’Etat ne peut plus continuer avec les mêmes pratiques et politiques de subvention et doit trouver une autre alternative, en libérant certaines activités d’importation, tout en préservant la sécurité alimentaire. « Je suis pour un holding d’Etat qui gère les importations des produits subventionnés et qui fusionne tous les o ces chargés de l’importation des produits subventionnés dont le rendement est aujourd’hui très critiqué », ajoute-t-il, estimant que les difficultés d’importation résident derrière la crise du pain.
En tout état de cause, la crise du pain est loin d’être terminée. Hier, le Groupement professionnel des boulangeries modernes relevant de la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie a décidé de reprendre ses mouvements de protestation, annonçant l’organisation d’un sit-in, à partir de lundi 21 août, devant le siège du ministère du Commerce et du Développement des exportations. A aire à suivre….

>> Lire aussi : Unanimité autour d’un risque de pénurie : «Touche pas à mon pain», crient les Tunisiens !

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